C'est l'heure de la pesée du ciel. Vingt grammes de moineau pour des tonnes d'averses. Je m'y prends ainsi: dans le noir de mon oeil, je mets le leurre d'un rêve. Le ciel appâté entre sous les paupières. Je referme aussitôt, je serre le lacet. Ça me fait deux valises pesantes.
Le reste est affaire de soustractions. Parfois par malice, je ne me déduis pas. Je feinte le nuage. J'appelle ça un jour d'humain, c'est-à-dire de Terre à terre, de ce corps de sable à ce jardin immense. (Extrait du recueil Une pesée de ciel aux Editions Alcyone, 2018)
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AUTOMNE LOINTAIN
Les feuilles se sont tournées, Dociles comme les lettres Qui s’ouvrent, Se lisent et se dévorent Derrière elles se laissent tomber, Les chuchotements d’un lecteur Et ses lèvres Glissant Sur la pointe du temps Le grignotant Un peu, beaucoup Tout doucement Et puis Le calme. (Extrait du recueil Qui dirait tout à paraître aux Editions Henry en automne 2018) i. m. Annie Abellaneda Sœur par une langue de feuillages Pourquoi es-tu silence au-dessus de l’ombrage d’ici ? Nous suivons la huppe fasciée sur la même allée au Bois de Feuilly Un castanea hâtif éploie ses chatons vers les frémis du saule Les sèves s’exfiltrent des mots esseulés Ta voix entend muer la mémoire Le bouleau s’écaille à l’os d’été À mes pieds — averse de lumière Puis-je fouler ce don ? Mon corps l’évite Du vol — vertige de voyelles— j’écoute : le Bois m’appelle ah-ah-ah nous… En Feuilly En Feuillu En langues Tirer des bordées
Pour rejoindre les rives de la pensée S’éloigner du rivage Sans s’en être aperçu de son cerveau en mode lavage Trop pressé Pour s’arrêter sur des lapalissades contraignantes Trop ennuyé Pour prêter quelques secondes de son attention à des feignantes Trop ignorantes Pour s’interroger sur les médiations et méditations enseignantes Trop moralisatrices Pour s’emporter il fait trop tard et trop tord Trop accaparé Pour s’éloigner des terres flemmes Trop, car débordé. Par la vie trop sous perfusions astreintes Trop enclin et déclin par l’essoreuse broyeuse Par malaxage Danger Réveille-toi ou crève en toi! Parce que sur l’autre bord, il fait beau, tout beau ! Phil Kieffer Cela va sans dire, mon chat parle. Il a choisi pour ce faire, le chant des voyelles si reines.
Ondulation de vagues, une âme dormant dessus. Radeau- rat dos, pour un chat c'est largo sur la mer des mots. Il embroche les sons d'un r entendu, ronron de fer, féru de sons. Il parle le « verlaine » de l'extase, dialecte sans phrases des poilus, la langue bien pendue d'un sourire moustachu. J'écoute son coeur qui souffle des poèmes, quand passe l'heure des songes bohèmes. Certaines fois il délire, se prend les crocs dans des consonnes. Il monte à la lune, il barytonne. Il approche du génie, je crois qu'il parle l'homme. Puis, il retombe en soupirs, la langue aux babines. Son discours bien léché, il roule de l'échine et s'endort muet. Cela va sans dire, mon chat parle. Il « maoule », il roucoule. Il a du répondant, nous conversons, sa bouche et mon oreille. Je suis son étrangère, ses syllabes essentielles. Il m'aime tant quand je l'épèle. Anna Jouy Neither fish nor fowl - Ni poisson ni volaille
Tôt le matin je suis sur la table d'opération Le sang pénètre goutte à goutte C'est étrange d'être perfusée avec une autre langue une nouvelle culture un réglage des précédentes De temps en temps je me retrouve sur la table pour une autre perfusion une autre langue un réglage des précédentes Il y a un déséquilibre d'humeurs qu'ils ne semblent pouvoir corriger un excédant peut-être Comme les vieux charlatans on parle de saignées (...) La carrière de sable
Ressemble A un vieux corps sans âme Tout comme cette terre qui s’enfonce dans la mer Et la mer qui prend couleur de sang séché La ville assiège le port Elle n’a plus rien des murs de ma mémoire Toute terre est prison La mienne a pris la couleur du sang frais Et les enfants se meurent sous les dalles d’insouciance Même le soleil vous fait grise mine Les fruits n’ont pas d’odeur Ils sont tous blets avant d’éclore Quelle est donc cette souffrance qui s’acharne sur ma terre Tout espoir s’est figé comme une bougie éteinte Ma terre-prison aux murs de peur La mer couleur de sang Quelle est donc cette douleur qui s’attaque à mon île Ma terre est un très vieux souvenir qui s’estompe dans les sables Gary Klang J’ai lu Lorsque je serai chevalier de Florent Toniello (Jacques Flament Éditions), recueil étonnant au style “bousculé” (comme me le confie Florent dans son dernier courriel) qui ne manque pas d’humour, d’audace mais aussi de profondeur. J’ai envie de dire que déjà, le lecteur reconnait le style Toniello avec ses juxtapositions fantasques (mais pas tant que celà finalement) de mots et d’idées. On a l’impression d’être pris par la main et d’etre entraîné sur une piste de danse dans un monde inintelligible (Réveil vers sept heures. Comme maintes fois maintenant déjà, la consultation des nouvelles fait monter ce sentiment d’être étranger à un monde que je n’ai pas voulu, …) . On aime le petit grain de folie qui anime les textes de ce “poète chevalier” à la feinte nonchalance (…si aujourd’hui mes vers ont/moins de lecteurs que mes mémos d’alors/je m’en contrefous) et dont l’intérêt pour les “petites choses” reflète des préoccupations plus vastes : “… Une chenille dévore un lys Du matin jaillit un rêve D’une respiration haletante Un piège à souris. Le fil des jours Coupe court à la motte des miracles.” VOYAGE, VOYANT .....
ma tête tombe ma tempe se presse à la vitre les pays-visage les pays aux traits graves aux traits tant de fois ressassés avancent par à-coups me gagnent m'empreignent se détachent par menus déchirements reviennent plus vifs me ceignent me lacent m'enferment se dévident en claquant puis aigus et mortels fondent sur moi fulgurant de toutes parts à jamais perdu tu voyais clair tu avais vu le chemin brouillé ton corps déchiré jonchant le bas-côté mes pieds barbotant ![]() Christian Garaud sur le voyage Le chemin est long... quand le poème joue au docteur mes lèvres sur ton poignet prennent ton pouls elles glissent le long du bras le chemin est long jusqu’à ton cou elles s’arrêtent un moment à la pliure du coude arrivées à destination je sens la chaleur du sang dans tes artères et j’écoute la vie qui traverse ron corps. Christian Garaud |
Juin 2016
Qui parle de nous ? C’est Claude Vercey dans Decharge (la revue) qui parle de nous. Allez-y: http://www.dechargelarevue.com/De-Leeds-et-d-Ailleurs.html Website by Susie Harkness
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