Né en 1977 dans les Alpes, François COUDRAY vit et travaille actuellement à Manille, Philippines.
Depuis Saisons-Pérégrinations (2008) et écrit avec de la terre (2010), il ne cesse d’interroger la douceur et la déchirure d’être de ce monde. Il collabore régulièrement à plusieurs revues (N47/4728, Les Citadelles, Décharge, Ecrit(s) du Nord, Triages, Contre-allées …). Ses projets l’amènent à faire dialoguer poésie, musique, théâtre et arts plastiques. Il travaille notamment avec la plasticienne Nicole Courtois, le compositeur Matthieu Lemennicier (transhumance, 2011) et la comédienne Clémentine Amouroux (l’amour n’a que nos corps, 2012). BIBLIOGRAPHIE (POESIE)
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pluie de décembre sans saison on est parti en plein après-midi dans les rues désertées de la ville on rêve marcher dans la fraîcheur de ce qui s’enfuirait le ciel et la terre lourde enfin d’un hiver à venir ou la terre écrivant au ciel comme un fragile adieu on rêve cette étreinte mais le ciel est sans déchirure immuable et lisse ciel sans arrière-pays et à l’éclat des verts, pourtant lavés d’enfance, à l’éblouissant feu des fleurs d’hibiscus manque l’obscure sève que seule éveille la blessure * je croyais le temps impassible mais après une nuit sans fraîcheur la lumière grise du petit matin sur la ville pose un nouvel été sur l’été comme on empile le linge de maison dans l’ombre poussiéreuse du salon aux persiennes closes et la chaleur imprime un nouveau canevas sur le drap usé du jour immobile * l’arbre que j’ai cru sans saison vibre et s’éclaire ce matin d’un vert tout neuf en quelques jours seulement ses feuilles ont roussi et les jeunes pousses s’agrippent au jour comme les mille mains d’un enfant tendresse d’une ronde où dansent tous les âges automne et printemps mêlés dans un même bosquet * je croyais le ciel sans heur mais de larges nuages dessinent enfin sur la ville la déchirure qui ouvre à l’enfant le jardin l’arbre des fugues des cabanes dans le pépiement des oiseaux des langues inventées * ce soir la lune boit toutes les rumeurs de la ville les noie et sourd un chant lointain l’entends-tu ? comme venu des profondeurs du temps noir de terre mêlé je colle mon oreille contre l’herbe la nuit je n’entends que l’eau la pierre cet autre chant, intérieur tout ce qui fuit résiste en moi à la simple fuite de tout * depuis plusieurs jours le ciel ronge la terre acide et doucereux érosion lente et fade sans déchirure sans jouissance * et ce matin à nouveau le ciel semble échapper à la ville la lune a pris du champ et je la suis dans le lointain sillage d’un poème François COUDRAY, inédits de Manille |